Saison 4: Au service de la Horde (sauf quand elle regarde pas).
Chapitre 1: Opération Charthang.
Le Grand Cultiste Vasles, agenouillé devant son autel impie, une statue à tête de reptile, ne pouvait contenir sa joie. Après deux années de durs labeurs, lui et ses disciples avaient collectés suffisamment d'âmes et de reliques démoniaques diverses pour mener à bien leur sinistre projet. Entouré d'une vingtaine d'adeptes, tous encapuchonnés, Vasles, ancien magistère de Silvermoon, renié par ses pairs il y avait déjà plusieurs années, allait invoquer un démon assez puissant pour causer du tort à ses ex-compatriotes elfes de sang. Il tenait sa vengeance. Ils allaient enfin s'apercevoir, tous autant qu'ils étaient, que Vasles n'était pas un individu que l'on exilait de Silvermoon comme un malpropre, pour une affaire ridicule d'expérimentations démoniaques sur des elfes de sang kidnappés au préalable. Il avait eu beau leur dire, à ces imbéciles, que ces expériences étaient un mal nécessaire pour arriver au final à relever le peuple sin'dorei, il avait du fuir la ville malgré tout.
Vasles jeta un oeil alentour. Les Terres fantômes semblaient aussi déprimantes qu'à leur habitude. Il était temps de retourner dans cette chère capitale elfique, avec force et fracas. Perdu au milieu des bois, à l'insu de tous, l'autel de Valashar avait été érigé pour accueillir le démon susnommé, Valashar. D'après la plupart des bouquins qui traitaient des démons, Valashar était une espèce de bestiole géante d'une trentaine de mètres à tête de reptile, protégée par une armure quasiment indestructible, capable d'anéantir sans trop forcer à peu près n'importe quelle ville mal préparée. Et Silvermoon l'était assurément, d'après les derniers rapports. Le temps que la Horde vienne en secours à la ville, Valashar aurait eu le temps de transformer toute la région en tas de gravats, et Vasles d'assister au carnage.
Vasles: Valashar, tes serviteurs t'apportent les offrandes nécessaires à ton invocation. Même si Jean-René ici présent a laissé tomber la Relique de l'Effroi dans la rivière, et qu'on a passé une semaine à la retrouver. Mais je m'égare.
Jean-René: C'est bon, me dénoncez pas à Valashar, Maître, c'est pas sympa. C'était un accident hein Valashar, mes excuses.
Cataline: On ne s'adresse pas à un démon reptilien comme à un vieux pote de comptoir enfin Jean-René!
Jean-René: Tu veux pas non plus que j'y fasse une révérence à Valashar nan? Avec tout le mal que j'ai eu à la retrouver cette saloperie de relique dégueulasse, c'est pas non plus trop raisonnable de me faire chier, même si on est un démon de trente mètres de haut qui crache du feu ou je sais pas quoi.
Cataline: Blasphémateur avec ça! Valashar va t'éparpiller à travers Azeroth pauvre fou!
Vasles: SILENCE!
Vasles tremblait de rage. Courroucer un démon était unanimement reconnu par les personnes capables de compter au moins jusqu'à dix comme un acte assez auto-destructeur et suicidaire.
Vasles: Comme je le disais, nous t'invoquons, ô grand Valashar! Et sache que nous nous désolidarisons tous complètement des propos tenus par Jean-René. Et si vous décidez de lui infliger des tourments éternels, on aurait pas grand chose à y redire.
Jean-René: C'est ça, jouez-la perso.
Vasles: Ô grand Valash...
Une boule d'énergie noire traversa à une vitesse phénoménale l'autel, transperçant trois disciples au passage, et entraînant l'effondrement de la statue à tête de reptile sur un quatrième cultiste. Vasles se retourna en vociférant, les yeux exorbités, et vit à quelques mètres de là, entre deux arbres morts, un mort-vivant en robe noire et bleue incanter toute une panoplie de sortilèges démoniaques dans sa direction. Vasles esquiva d'un bond sur le côté, se prit les pieds dans sa longue robe de cultiste, et poussa un juron. Le Grand Cultiste vit alors un autre mort-vivant, avec deux dagues, en train de charcuter ses hommes avec une vélocité et une frénésie assez exceptionnelles. Et un peu plus loin, surplombant les restes de l'autel de Valashar, un marcheur du vide énorme essayait d'attraper de ses gros doigts boudinés quelques reliques qui trainaient pour les fracasser contre les rochers et les arbres.
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Krayvur: C'était trop facile. Alors comme ça, c'est ça le « ténébreux groupe de cultistes qui menacent Silvermoon »? Laisse moi rire.
Akavar: On a pu jouer de l'effet de surprise, mais c'est vrai qu'ils étaient franchement pas terribles.
Charthang: Vous m'avez menti!!! J'ai foutu en l'air les reliques et y avait pas de chocolat à l'intérieur!
Krayvur: Le fait que tu ais cru à une histoire aussi con m'inquiète vraiment.
Gaqkua: Désolé les gars, j'ai raté quelque chose?
Krayvur: Bof.
Akavar: Où t'étais encore passé?
Gaqkua: J'sais pas, j'étais allé pisser, et en revenant, je me suis aperçu que j'étais un peu perdu. Je vous ai retrouvé, mais j'avais encore envie finalement, alors j'y suis retourné, et je me suis re-perdu.
Akavar: On se passera des détails à l'avenir.
Gaqkua: Sinon, c'est qui le gus qui se roule dans son sang, un ami à toi?
Akavar: D'après la prime sur sa tête, c'est Vasles, un genre de cultiste.
Krayvur: Le genre complètement à chier.
Vasles: Je ne vous permets pas, engeances répugn...
Akavar pointa du doigt le pauvre Vasles, qui prit inexplicablement feu, et s'effondra pour de bon.
Gaqkua: Décidément, ce pouvoir, c'est trop la classe.
Akavar: Ouais, mais le temps de recharge est vachement long.
Gaqkua: T'avais qu'à pas le faire alors.
Akavar: Ouais, mais il m'a énervé l'autre là.
Krayvur: Assez. Retournons dans la ville elfe chercher notre récompense. On vient de sauver la ville d'un enculé complètement nase.
Charthang: Dis donc, ça s'arrange pas ton langage...
Krayvur: Nan mais ça m'énerve. A chaque fois on m'annonce un ennemi fortiche, à la tête d'une armée, et au final, c'est toujours un gros glandu le type. BORDEL!
Akavar: De toute façon, on va encore leur faire croire que le mec a failli détruire le monde, ou un truc du genre, et on aura encore un bonus.
Gaqkua: C'est malhonnête.
Gaqkua fixa Akavar dans le blanc des yeux. Puis au bout de quelques secondes, ils éclatèrent simultanément de rire.
Akavar: Hahaha, me fais pas rire, j'ai une crampe à la mâchoire.
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Un magistère à la longue crinière rousse lança à Akavar son plus magnifique regard de méfiance.
Magistère: Alors comme ça, Vasles a failli détruire le monde...
Akavar: Ouais, il a voulu invoquer un truc pas super marrant dans les Terres Fantômes avec l'aide de ses potes. Valashar, un truc comme ça.
Magistère: Jamais entendu parler.
Akavar: Ecoutez mon vieux, j'vous ai rapporté la tête du gars en tout cas.
Magistère: Bon, je vous file la prime, avec un bonus, vu que vous êtes un prestataire de service assez régulier.
Akavar: Ouais merci c'est sympa. Hey, Krayvur, viens chercher ta part.
Krayvur: Garde-le va, je tue pas par avidité moi.
Gaqkua: Ouais enfin par plaisir, c'est pas beaucoup mieux.
Charthang: C'est même pire.
Krayvur: Fermez-la, les chouineurs.
Akavar: Bon, au revoir hein.
Le démoniste et sa clique s'éloignèrent du magistère, qui retournait à ses affaires après avoir jeté un regard dédaigneux à la bande de mercenaires. Avant que ceux-ci n'aient eu le temps de quitter la ville à la recherche d'autres missions intéressantes, un messager réprouvé vint porter un message à Akavar.
Akavar: Hey, mais en plus y a le sceau royal.
Charthang: Si c'est une invitation à un buffet gratuit, je viens.
Akavar: Dans tes rêves mon gros. Toi t'iras nulle part.
Gaqkua: Bon bah ouvre cette lettre, on va pas y passer trois heures.
Akavar: Ouais ouais, ça vient. Alors... Oh yeah. OH YEAH! J'suis convoqué à la salle du trône de Lordaeron! Vous savez ce que ça veut dire? Je vais voir Sylvanas! Yeah, yeah, yeah, yeaaaah!
Le réprouvé entama une danse de la victoire au milieu de la place commerciale de Silvermoon, et les passants prirent bien soin de s'éloigner le plus possible de ce rustre possiblement dégénéré.
Charthang: Erf, pas de buffet… J'peux venir quand même?
Akavar: Hahaha, toujours pas nan. Bon, les gars, c'est officiellement le début de mon heure de gloire. Je vais avoir le droit de parler à la Dame Noire, héhéhéhéhéhé!
Gaqkua: Combien on parie que dans deux jours, t'es en train de te faire pulvériser la cage thoracique par un type méchant, dans une région paumée?
Akavar: Nan nan nan, c'est vraiment le sceau royal et tout là, c'est pas un piège.
Charthang: C'est sûr, je viens pas?
Akavar: Plus le temps passe, plus c'est sûr, ouais.
Gaqkua: Et moi je peux venir?
Akavar: J'amène pas de démons avec moi, z'êtes pas bien. Je vais finir dans une cage suspendue au plafond de l'Apothicarium si je vous laisse faire vos conneries. Là, j'y vais tout seul! Comme un grand!
Krayvur leva un pouce, en guise d'approbation. Les jeunes, il fallait toujours les encourager dans la vie, pensait le mort-vivant.
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Et c'est tout seul, comme un grand, qu'Akavar entrait dans la salle du trône de Fossoyeuse, en saluant amicalement les gardes, en sautillant, une boîte de chocolat et un bouquet de fleurs dans les mains. L'un des gardes royaux claqua sa main devant ses yeux en voyant passer le démoniste, et la plupart des autres hochaient négativement la tête.
Le démoniste tomba à genoux au pied du trône en multipliant les éloges envers sa reine. Sylvanas regardait Akavar en levant un sourcil. La reine était debout, entourée par deux gardes royaux lourdement armés.
Sylvanas: C'est ça Akavar?
Un des deux gardes à proximité assura que «c»'était Akavar, et la reine banshee soupira, toujours méfiante.
Sylvanas: Certains de mes sujets m'ont parlé de vous en bien. J'ai éventuellement une mission à vous confier. Si vous vous en acquittez correctement, il est possible que je vous confie d'autres missions importantes à l'avenir. Inutile de vous dire qu'un refus de votre part serait fâcheux.
Akavar: Ah ouais mais nan, moi je vous refuse rien hein.
Garde royal: On est encore tombé sur un beau là...
Garde royal à crêtes: Encore un simplet de la campagne, un vocabulaire limité à trente mots et une syntaxe erratique. Oui oui... Enfin bon, on lui demande pas de rédiger une thèse j'imagine.
Akavar évita de montrer sa stupeur et son angoisse, quand il vit Gaqkua se faufiler à l'arrière de la salle du trône, et faire de grands gestes vers son maître et danser. Le démoniste grinça des dents en apercevant le diablotin mimer des obscénités en pointant du doigt successivement Sylvanas et Akavar lui-même.
Sylvanas: Vous allez reprendre un ouvrage que nous avons... Vous m'écoutez, imbécile?
Akavar: Oui, euh oui oui. Un ouvrage tout ça.
Garde royal à crêtes: Oh l'taré...
Garde royal: Je croyais qu'il y avait une genre de sélection à l'entrée.
Sylvanas: Silence! Comme je vous l'expliquais, vous devez nous ramener un livre très important qui nous a été dérobé par...
Alors que la reine expliquait la teneur de sa mission au réprouvé idiot qui lui faisait face, celui-ci faisait de discrets signes du regard à Gaqkua, qui gigotait de plus belle en arrière-plan. Il était clair que le diablotin se bidonnait, se foutait ouvertement de la tronche de son maître, en se moquant à présent des chocolats et des fleurs qu'il avait apporté, et que les gardes lui avaient ôté des mains pour les jeter au feu. Le démon mima Akavar en train de lécher les pieds de quelqu'un, vraisemblablement Sylvanas, puis les mimiques devinrent très très très scabreuses, et impliquaient l'usage d'un fouet.
Sylvanas: Vous écoutez ce que je dis, espèce de lamentable dégénéré?!
Garde royal: Ah y a des vedettes hein là!
Akavar: NAN MAIS C'EST L'AUTRE LA Y M'FAIT DES GESTES!
Garde royal: Ah bah il s'énerve maintenant.
Garde royal à crêtes: Dire qu'il y en a sûrement plein des comme lui, là dehors...
Garde royal: Ca fait froid dans l'dos.
Gaqkua avait évidemment disparu au moment où Sylvanas s'était retournée. Celle-ci repoussa son envie de faire du mal et répéta une dernière fois au démoniste ce qu'il devait faire. A savoir buter un genre de nécromancien collectionneur de bouquins morbides, et rapporter un des bouquins morbides en question à Fossoyeuse. Le tout se passerait vaguement aux alentours de Bois de la Pénombre, territoire de l'Alliance, donc le démoniste devrait de surcroit faire preuve de discrétion, de tact, et d'intelligence pour ne pas faire de vagues. Gaqkua, dissimulé dans un recoin de la salle du trône, se fit la réflexion à lui-même que c'était mission impossible.
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Akavar: Bon alors. Discrétion. Déjà Charthang tu restes là. Tact. Pas de Krayvur donc. Intelligence. Charthang, tu restes doublement là. En sachant que Gaqkua est pas discret non plus. Bon. Flaadrom, Carrona, ça va être nous trois contre le nécromancien.
Flaadrom: La fine fleur de l'équipe!
Carrona: La crème de la bande!
Gaqkua: Le niveau est pas bien haut non plus, de base.
Carrona: Jaloux!
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Flaadrom, Carrona et Akavar traversaient furtivement le Bois de la Pénombre, en tenues de camouflage. Ca se traduisait par des robes à capuches pour Akavar et Carrona, et par une tenue de ninja pour Flaadrom. Flaadrom aimait les ninjas.
Flaadrom: 'Fait pas chaud hein?
Akavar: Tu vas nous faire repérer!
Carrona: Surtout pour balancer une phrase aussi bateau...
Flaadrom: D'un autre côté, il fait pas chaud, j'ai quand même le droit de le dire nan? Elle est où là ma liberté d'expression?
Carrona: Tu peux pas t'empêcher de parler hein? C'est ça toi ton vice en fait.
Flaadrom: Ouais, j'suis bavard, admettons. Moins que Gaqkua quand même. Mais moi par contre, je me déguise! C'est une véritable valeur ajoutée!
Le chien corrompu exhiba sa musculature en souriant. Carrona eut un râle de dégoût.
Akavar: Ca vous dérangerait de... j'sais pas... fermer vos gueules par exemple?
Carrona: Heho, tu me parles pas comme ça!
La succube envoya un coup de sabot dans le dos du réprouvé, qui s'excusa platement.
Carrona: C'est pas comme ça que je t'ai élevé!
Akavar: Mais Mamaaaaaaan, Gaqkua a dit que j'avais le droit de dire «vos gueules»!
Carrona: Celui-là, quand on rentre à la maison, il s'en prend une.
Flaadrom: Désolé d'interrompre votre conversation dérangeante, mais on arrive quand?
Akavar: On doit encore traverser un cimetière, et on verra un manoir en ruines sur une colline, en théorie.
Flaadrom: Encore un cimetière? Ca fera que le trentième après tout. C'que c'est glauque cette région.
Carrona: Et une fois sur place, c'est quoi le plan?
Akavar: Oh, bah je comptais inventer au fur et à mesure, comme d'habitude.
Carrona: Ah oui d'accord. Bon, je vais réfléchir à un truc le temps qu'on arrive hein.
Akavar: T'as qu'à faire ça ouais.
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Tommy: On y est, a y'est! A y'est!
Karadrin: Ouais, on a vu, mage.
Tommy: Depuis quand tu m'appelles mage? Je t'appelle nain moi?
Paula: Roh, mais bouclez-laaaa.
Le capitaine de la Hell Patrol, Johnson, leva la main, et tout le monde fit silence. Le guerrier humain trouva cela trop classe.
Johnson: Les mecs, on encercle le manoir. Et ensuite, on ordonne au nécromancien de bien vouloir se rendre, sans quoi on défonce tout.
Gritz: Ca aurait pas été plus simple de le prendre par surprise?
Johnson: Ca aurait fait tapette. La Hell Patrol ne fait pas tapette. JAMAIS.
Le gobelin Gritz baissa les yeux, honteux. Il ne voulait pas faire tapette. Le draenei Top Bob et le gnoll Jean-Paul venaient tout juste de rejoindre l'avant-garde de la Hell Patrol, haletants.
Johnson: Où sont les autres?
Top Bob: Garondar s'est fait attaquer par un loup, et depuis, il est réfugié dans une souche d'arbre. Il doit encore être en train d'y gémir. Sinon, on a paumé Kara aussi. Et Naguell le Sympa s'est éloigné pour aller pisser, et on l'a plus revu depuis.
Johnson: Mais c'est pas vrai! On va faire quoi sans le prêtre, le démoniste, et l'assassin!
Karadrin: Eh Boss, vous nous avez nous!
Karadrin et Tommy se pointèrent mutuellement du doigt, les pouces levés, le sourire étincelant.
Johnson: Ouais, c'est génial. C'qu'on va faire, c'est qu'on va attendre les autres quand même.
Tommy: J'le prends mal là, vous sous-entendez qu'on craint?
Johnson: Haha, carrément que je le sous-entends.
Paula ricanait, alors que Tommy et Karadrin jouaient les offusqués, les mains sur les hanches.
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Quatre silhouettes vagabondaient elles aussi sur les routes de Bois de la Pénombre. A la suite d'une sombre affaire de vol de tonneaux de bière, non élucidée, Aydissa, Tyrallias, Thierry, et Drathir s'étaient retrouvés perdu dans un des cimetières de la région, et personne ne se souvenait plus pourquoi. C'était une journée comme les autres pour Aydissa, les jours se suivaient et se ressemblaient. Le matin, on pouvait être à Baie-du-Butin à siroter une limonade sur la terrasse d'un resto, et le soir en train de ramper dans la boue, en évitant les tirs de mortiers des Sombrefer.
Aydissa, en robe de mage bleue, dénotait dans le groupe de quatre. Déjà, elle était une draenei. Ensuite, c'était une femme. Enfin, elle était la seule à ne pas avoir une allure de barjo dégénéré issu de générations de consanguinités crasses.
A sa droite, sur le sentier, Thierry marchait en zig-zag, comme à l'habitude. De mémoire d'homme, personne n'avait vu le nain marcher droit. Ce nain était un chevalier de la mort, un de ceux qui avaient échappé aux griffes du Fléau il y avait quelques mois de cela. Nul ne savait pourquoi il fut choisi comme chevalier de la mort, comment il avait pu en sortir indemne, et comment il pouvait encore continuer d'exister aujourd'hui. Le nain arborait fièrement une immonde barbe rose vif, et des breloques qui n'allaient pas les unes avec les autres. On eut dit qu'il avait simplement ramassé des détritus par terre pour s'en faire une vague armure. Et ce n'était pas loin de la vérité.
Thierry était l'Epave Ultime. Le nain dont tout le monde avait pitié, quand il ne parlait pas. Quand il parlait, il était surtout énervant.
Quelques mètres derrière lui, Drathir suivait tranquillement le mouvement, sans rien dire. Il était lui aussi un chevalier de la mort, un humain, et affichait un calme extrême face à toutes les situations. Il portait une lourde armure de plates qui lui aurait donné fière allure s'il n'était pas constamment coiffé d'un large chapeau bleu-vert qui lui donnait un air de paysan arriéré. Pourtant, Drathir marchait avec classe et prestance. Pour lui, les chapeaux, c'était « gg ». En effet, l'humain, bien que ne s'exprimant pas souvent, utilisait une étrange expression quand il souhaitait communiquer: gg. On ne savait pas trop ce que cela voulait dire mais il s'en servait constamment. Selon les circonstances, ça pouvait vouloir dire « bravo », « pas mal » « marrant»... Les choses se compliquaient quand Drathir lâchait un « quel gg ce Thierry » ou « tout cela me semble fort gg ». Dans l'ensemble, c'était quand même pas un mauvais gars.
Un mauvais gars, il y en avait bien un dans la bande. C'était Tyrallias. Lui aussi humain chevalier de la mort, en armure de plates, avec un gros casque cornu et une épée à deux mains d'une taille monumentale, Tyrallias était le modèle-type du trou du cul. Vantard, agressif, avide de sang, méprisant, une journée que Tyrallias ne finissait pas au cachot était une journée gâchée. Son manque de diplomatie à l'égard du monde entier en faisait un type solitaire, mais très bourrin, qui n'avait même pas l'excuse de l'alcool pour expliquer son comportement outrancier, au contraire de Thierry.
Bref, Tyrallias était simplement un malade mental qui aurait plus sa place au fond d'une tombe, ou coulé sous du métal fondu, que dans Stormwind où il sévissait habituellement après minuit. A force de jouer au cinglé, il était devenu une caricature de lui-même.
Drathir: Eh, les mecs, on va où là? Je suivais vaguement Aydissa en fixant ses gg fesses, mais maintenant je m'ennuie.
Aydissa: Je sais pas où on va, je suivais Tyrallias.
Tyrallias: Ah d'accord. Non, moi je suis Thierry.
Aydissa: Quel genre de taré suivrait Thierry dans cet état là?
Thierry: Houla, du calme femelle! J'peux encore t'en coller une dans ton minois si tu mouftes trop fort...
Aydissa: Tu tiens à peine debout...
Thierry: C'est ça, continue à me saouler, tu vas pas être déçue du voyage.
Tyrallias: Ouais, contente toi de laver les slips et de faire la vaisselle, on t'en demande pas plus Aydissa.
Aydissa: Je sais même pas pourquoi je vous parle.
Tyrallias: Nous non plus on sait pas, t'as qu'à te casser.
Aydissa: Vous savez quoi? Z'avez raison, je vous laisse là, tas de pignoufs.
Tyrallias: Un jour, je te tuerai.
La draenei fit demi-tour en pestant. Tyrallias hésita un instant à dégainer son arme, mais se ravisa. Thierry trébucha sur un pavé et insulta celui-ci de toutes les forces qui lui restaient. Drathir ne comprenait pas trop ce qu'il se passait, et se questionnait en son for intérieur, sur le caractère gg ou non de sa situation actuelle. A l'instant où Tyrallias s'apprêtait à menacer de mort ses compagnons d'infortune, par ennui, un elfe de sang sortait des bois, haletant, suivi par une elfe de la nuit en tenue de cuir, et par un humain en robe de prêtre, qui sanglota de plus belle en croisant le regard des chevaliers de la mort.
Naguell le Sympa: Euh salut les gars! On fait que passer...
Tyrallias se tourna vers Thierry, stupéfait.
Tyrallias: Thierry, je rêve ou bien cet étron sur pattes a osé m'adresser la parole?
Thierry: Attends, je sais pas, je... J'y vois plus rien, et j'ai la tête qui tourne...
Naguell: Pas de quoi partir dans les insultes, on est juste des voyageurs, pas des ennemis!
Tyrallias: C'est moi qui décide de qui est mon ennemi ou pas, lamentable larve!
Tyrallias dégaina son arme avec férocité. Thierry ne parvenait pas à se relever et préféra rester allongé pour éviter d'avoir l'air encore plus idiot. Drathir était physiquement absent, sans doute trop occupé à examiner la poitrine de l'elfe de la nuit sous toutes ses coutures. Kara justement, sortit de son fourreau ses deux dagues en se plaçant entre Tyrallias et Naguell. Garondar était en larmes.
Kara: Je te conseille de poser cette arme, imbécile.
Tyrallias: C'est pas deux chialeuses et une bonne femme laveuse de slips qui vont m'empêcher de faire ce que je veux, quand je veux. Et là, j'ai bien envie de garder mon arme, et de vous tailler en morceaux.
Naguell: Cet homme est visiblement un fou.
Tyrallias: Je ne suis pas fou, vous osez exister dans le même univers que moi, sans ma permission, il y a outrage là! J'exige réparation!
Garondar: Fuyons, il va tous nous tuer!
Kara: Garondar, ferme-la!! Et toi le chevalier de la mort, tu n'auras pas le temps de faire deux pas que tu agoniseras dans ton sang, comme le chien que tu es.
Thierry: Tyrallias, je sais pas ce que t'en penses, mais si j'étais toi, je me laisserais pas marcher sur les burnes par une vile gonzesse violette.
Tyrallias: En effet, j'approuve. Je te laisse deux secondes pour prier ta déesse de mes fesses, tant que tu peux encore, femelle.
Drathir: Haha, gg le mec pas agressif déjà... Eh mec, et si on allait plutôt à la taverne de Sombrecomté? Ca sert à rien de tuer ces trois là, on va encore finir au cachot si c'est des gens gg connus. Allons à la taverne.
Thierry: Eh, j'suis pas contre, y a de la cochonne là-bas? De la ribaude?
Drathir: Ouais, y aura gg plein de « cochonnes ».
Tyrallias: Deux minutes, le temps que je tue les trois pauvres nullards là!
Thierry: Laisse tomber vieux, on dirait que l'elfe et l'humain ont des pouvoirs magiques et tout. C'est ton point faible.
Tyrallias: Ha! Ha! Les misérables chiards! Ha! La bande d'étrons riants! Ca se cache derrière des « pouvoirs magiques hyper mystiques et tout hein »? Ah ouais hein? Ah ouais hein? Je vous traquerai. Je vais chercher mon armure anti-magie, et je vous traquerai! VOUS ÊTES LAMENTABLES! VOUS M'ENTENDEZ? LISEZ SUR MES LEVRES PENDANT QUE JE HURLE! LA-MEN-TABLES!
Thierry: Allez les gars, on va cuisser de la grosse! Hahaha!
Naguell posa sa main sur l'épaule de Kara, l'air de dire « inutile de perdre du temps avec des glandus pareils ». L'elfe de la nuit acquiesça en reculant doucement.
Tyrallias ramassa Thierry, toujours cloué au sol, pointa du doigt les trois membres de la Hell Patrol à tour de rôle, et grogna. Drathir lança un « au revoir » qui ne lui fut pas rendu, et s'éloigna à son tour des trois agressés.
Kara: On a perdu un temps précieux.
Garondar: Tu rigoles? On a gagné le droit de vivre encore un peu!
Kara: Honnêtement, je sais pas ce qui me retient de te planter une lame dans le bide tout de suite...
Garondar: La pitié?
Kara: Oui, la pitié...
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L'esprit agité d'Akavar bouillonnait. Il était temps de faire preuve de finesse. Une bande de gusses campait devant le manoir du nécromancien. Et Sylvanas avait bien dit « pas d'incidents diplomatiques ». Flaadrom, sur sa gauche, remuait en attendant que quelque chose se passe. Carrona analysait la situation avec calme et sagesse.
Carrona: Bon... Ca va pas être de la tarte.
Akavar: On a qu'à tous les tuer, et les incinérer. Pas de traces, pas de preuves.
Carrona: Depuis quand tu te mets à tuer des gens qui t'ont rien fait?
Akavar: Depuis qu'on me paye pour ça.
Carrona: T'es vraiment devenu glauque depuis Strangleronce, on ne tuera pas d'innocents aujourd'hui!
Akavar: L'innocence n'existe pas, il n'y a que des degrés de culpabilité. C'est écrit dans un bouquin.
Flaadrom: Hey les mecs, regardez ça!
Akavar et Carrona virent arriver vers la petite troupe devant le manoir un marcheur du vide bedonnant et sifflotant, l'air benêt. Akavar retint un juron et Carrona soupira.
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Charthang salua la Hell Patrol de façon familière. Un peu trop familière au goût de Karadrin qui attrapa sa hache avec hargne. Il n'aimait pas être qualifié « d'aminche ». Tommy et Jean-Paul froncèrent les sourcils.
Tommy: Attendez, je l'connais, j'reconnais sa face! C'est le marcheur du vide du démoniste qu'on pourchassait dans Strangleronce!
Jean-Paul: Ouais, un genre de boulet suprême qui pense qu'à bouffer! Un gros neuneu!
Charthang: Ah ouais, j'vous reconnais, salut les potos.
Johnson: Que fais-tu ici, démon?
Charthang: Euh. Je... Je sais pas.
Johnson: Comment ça tu sais pas? T'es bien ici pour une raison nan?!
Charthang: J'saurais pas dire...
Dans le regard de Charthang se reflétait l'incompréhension et la stupidité crasse. Johnson comprit rapidement que le démon bleu était un genre de débile profond mono-neuronal. Ses yeux glauques et son sourire niais ne trompaient pas.
Johnson: Reprenons doucement, pourquoi t'es là? C'est quoi ton projet là?
Charthang: Bah euh, je marchais. Et... Et voilà quoi.
Karadrin: Et ben, il en tient une couche celui-là...
Johnson: Et avant ça, d'où tu viens?
Charthang: Bah avant j'étais là moi...
Le marcheur du vide désigna le sentier derrière lui.
Charthang: Moi j'étais là quoi.
Johnson: Non mais il le fait exprès en fait, c'est ça?
Tommy: Il est réellement comme ça, il fait pas semblant. C'est le demeuré quoi. Le bon gros demeuré de base.
Paula: Le démoniste est peut-être dans le coin du coup...
Johnson: Pas bête, soyez sur vos gardes.
Charthang: Bon, allez, c'est pas tout ça, mais j'ai encore de la route à faire!
Johnson: Pour aller où?
Charthang: J'saurais pas dire...
Johnson: RET'NEZ MOI, JE VAIS L'DETRUIRE!
Jean-Paul: Du calme boss, on peut pas gagner psychologiquement face à lui!
Paula: C'est sûrement un piège, on nous prépare une embuscade et c'est la diversion!
Karadrin: Ou bien le démon va se mettre à exploser si on le touche, j'ai vu ça une fois sur un gobelin...
Gritz: Entre un gobelin et un démon, y a quand même une nuance hein!
Karadrin: Une bien faible nuance.
Tommy et Karadrin s'échangèrent un regard entendu, laissant Gritz grincer des dents dans son coin.
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Carrona: Charthang nous offre une diversion en or!
Flaadrom: Ce type est un as. J'aurai jamais pensé dire ça de lui.
Akavar: M'est avis que c'est un parfait clampin, mais je respecte vos opinions. Allons-y, on fait le tour et on entre.
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Le très méchant nécromancien Phinéas caressa sa longue barbe grise de méchant. Son manoir était peut-être miteux, mais sa longue collection de livres scabreux imposaient le respect. Il était maintenant temps de, peut-être, s'attaquer à la création d'une armée de mort-vivants, histoire que son titre de nécromancien ne soit pas usurpé. C'est vrai qu'il passait son temps il y a quelques années à fanfaronner à la taverne, et que le coup du « hey les mecs, en fait euuuh, j'suis nécromancien! Ouais ouais, j'ai une armée de... de zombies et tout! » avait peut-être été un peu exagéré. Mais bon, maintenant, fallait assumer, au risque de mourir. Plutôt crever que d'avouer un mensonge! La fierté passait avant tout.
Phinéas avait bien étudié son affaire, il pensait dorénavant être capable d'invoquer un ou deux pignoufs zombifiés. Alors qu'il s'apprêtait à quitter sa bibliothèque pour se rendre au sous-sol, une porte sortit de ses gonds et percuta le mur d'en face à toute vitesse. Face à Phinéas, un homme en armure. En lourde armure. Avec une longue chevelure blonde, des yeux d'un bleu profond, et un sourire ultra-bright.
Phinéas: DAMNED, UN PALADIN!
Paladin: Tu peux m'appeler Jehan Menahas, crevure!
Le paladin afficha un sourire arrogant, haussa un sourcil, plaça ses mains sur les hanches, et se gaussa.
Jehan: Pathétique vermine, ton règne de terreur prend fin aujourd'hui! La puissance de Ma Lumière te surpasse en tout points! Tu as le droit de m'implorer, mais n'espère pas survivre, je suis intraitable avec les rats des champs!
L'homme dégagea une mèche de cheveux en slow-motion, et agita dans tous les sens son lourd marteau de guerre sacré. Alors que le paladin se dandinait, un démoniste et deux de ses démons entraient à leur tour dans la chambre. Akavar lança une ou deux insultes à ses futurs adversaires, en guise d'introduction.
Jehan: Un infâme réprouvé! Et démoniste avec ça! Une raclure dans ton genre mérite à peine de souiller mon environnement immédiat!
Akavar: J'vais t'faire bouffer tes sous-vêtements, vil paladin!
Phinéas: Ouais, allez vous battre dehors tiens. Et refermez derrière vous.
Le paladin envoya un vague coup de marteau dans la direction du nécromancien, en continuant de fixer du regard le démoniste qui se tenait face à son auguste personne. Phinéas hurla, et s'écroula contre une étagère. Celle-ci s'effondra sur le nécromancien agonisant, dans l'indifférence générale. Un chaos indescriptible s'empara des lieux, alors que le paladin et le démoniste se mettaient sur la tronche. En plus, les chaos indescriptibles, ça évitait à l'auteur de faire des descriptions de plus de cinq lignes. Contentons-nous de signaler qu'un nombre indécent d'explosions avaient retenti (comme c'est inhabituel...), que la plupart des étagères s'étaient cassées la figure, et que Flaadrom avait pleuré deux fois. Après quelques minutes d'affrontements, Akavar, déjà épuisé, se planquait derrière un tas de bouquins. Le paladin n'affichait aucun signe de fatigue, malgré quelques dégâts magiques encaissés de plein fouet. La Lumière, ça avait l'air vachement pratique quand même. La tête de Flaadrom était encastré dans le plafond juste au dessus de lui, et le corps inerte du démon se balançait mollement de gauche à droite. Carrona ne donnait plus de signes de vie depuis le coup de l'énorme explosion d'énergie sacrée de Jehan. En résumé, le brave réprouvé se trouvait encore dans la situation du gros galérien pas très loin du repos éternel. Il envisagea la fuite, mais vit Carrona se dégager de sous une étagère, et charger le paladin avec rage. Le démoniste attendait l'occasion de frapper.
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Jean-Paul: J'entends des bruits depuis le manoir.
Karadrin: Et alors? Te sens pas obligé de nous raconter ta vie!
Tommy: Eh, tu parles autrement à Jean-Paul toi, on est pas à une beuverie de nabots poilus et gueulards!
Karadrin: C'est bien dommage.
Jean-Paul: Désolé d'insister, mais ça m'a l'air sérieux là...
Johnson: On n'ira nulle part sans Kara, Naguell et Garondar. On est une compagnie de mercenaires sérieuse, pas des branquignoles désorganisés. On fait ça depuis deux ans quand même.
Tommy: Ca nous a moyennement réussi jusqu'à présent. Rien qu'à voir le fiasco de Strangleronce...
Gritz: Et plus récemment la débâcle près de Karazhan...
Tommy: Ca, c'était principalement la faute de Top Bob.
Top Bob: Qu'est ce t'as, tu t'sens pas bien là, pour m'agresser comme ça, sans préparation psychologique et physique?
Jean-Paul: Tiens, on t'entend pas beaucoup toi aujourd'hui.
Karadrin: Ouais, bah c'est pas un mal.
Top Bob: Toi aussi t'en veux une? Tu viendras pas te plaindre quand une de mes balles se sera logées dans ton crâne...
Johnson souffla du nez. A chaque jour qui passait, l'envie de commettre un meurtre était plus forte. Le fait que Charthang se tenait à deux mètres de lui et le fixait avec un sourire niais depuis dix bonnes minutes accentuait hautement le phénomène.
Johnson: Tu peux pas reprendre ton chemin, démon?
Charthang: Pour aller où?
Johnson: MAIS J'EN SAIS RIEN MOI !!!
Charthang: Ah...
Le chef des mercenaires plissa les yeux. Il semblait maintenant évident que le marcheur du vide était une genre d'arme ultime, destiné à provoquer crises de nerfs à répétition, jusqu'à ce qu'un incident survienne. Cette théorie se tenait, et se confirmait à chaque nouvelle réflexion débile de l'obèse bleu. Johnson poussa un cri de soulagement en voyant enfin arriver Kara et les deux autres pedzouilles.
Johnson: Vous étiez où?
Kara: J'ai retrouvé Naguell et Garondar. On a été attaqué par des worgens, puis on s'est fait casser les pieds par trois ahuris. Mais nous voilà.
Johnson: Bien. Nos gars s'impatientaient, on va attaquer ce manoir et en finir vite. Et recevoir une paye bien méritée.
Kara: Entendu.
Johnson: Rassemble les gars, je te laisse juge pour la tactique à élaborer.
Une des vitres du manoir se brisa alors que Kara commençait à ordonner le groupement. Une succube avait vraisemblablement été projeté à travers la fenêtre, et achevait sa chute sur l'escalier en contrebas, dans un craquement horrible.
Johnson: Qu'est-ce qu'il se passe ici ?!
Karadrin: On s'est fait doubler, à force d'attendre les demeurés!
Tommy: C'était pas faute de le dire, qu'il aurait mieux fallu abandonner en forêt Miss Kara, la lopette pacifique, et la lopette chialeuse!
Johnson: Vous allez tout de suite changer de ton avec vos camarades, tas de boulets! Vous avez causé bien plus de torts dans ce groupe que Kara ou Naguell!
Tommy: Bah tiens, le chef défend sa nana, c'est étonnant...
Johnson: Kara n'a jamais été ma « nana » comme tu dis, mage simplet!
Kara: Laisse-le Johnson, Tommy est un frustré aigri.
Tommy: J'ai le mérite de pas passer par la promotion canapé, catin!
Karadrin: Wahou, gros, t'y vas fort là...
Kara: Répète ce que tu viens de dire pour voir?
Johnson sentait la situation lui échapper. Tout le monde était tendu. Kara avait été énervé par la bande de ploucs qu'elle avait croisé, Tommy, Karadrin et lui-même avaient du être énervé par... Le mercenaire se retourna avec fureur vers Charthang, qui lui souriait. C'était certain désormais. Le marcheur du vide était un instrument de discorde.
Johnson: Petit salopard...
Charthang: Qui ça? Moi?
Johnson: Ne fais pas l'innocent avec moi!
Charthang: Quelqu'un aurait quelque chose à manger, j'ai un creux?
Johnson: JE VAIS TE DETRUIRE, SALETE!
L'humain bondit sur le démon, et le martela de coups de poings. Charthang ne comprenait pas pourquoi tout le monde voulait lui foutre sur la tronche, et se plaignait fortement de la correction infligée. Un peu plus loin, Tommy et Karadrin affrontaient Kara et Top Bob, avec violence. Jean-Paul et Gritz s'échangeaient des insultes, après un désaccord vis à vis de leurs paris respectifs sur les vainqueurs de l'affrontement, Paula et Naguell assistaient impuissant au déchirement de la Hell Patrol, et Garondar avait déjà foutu le camp vers la souche d'arbre de tout à l'heure.
Dans l'ombre, à quelques dizaines de mètres de là, Gaqkua et Krayvur hochèrent de la tête, satisfaits.
Gaqkua: L'opération « Charthang » est un succès, partenaire.
Krayvur: On prouve ainsi à nous-même et au monde entier qu'on est capables d'élaborer un plan tout en finesse!
Gaqkua: Le plus dur aura été d'attirer Charthang dans le coin sans qu'il nous remarque, mais en déposant des saucisses sur le chemin, on a réglé ce petit accroc.
Krayvur: Dès qu'Akavar aura fini sa mission, on lui explique comment on l'a aidé discretos et en douceur, et comme ça, ça lui apprendra à plus me prendre pour un bourrin débile, et à plus te prendre pour un rascal immature et immoral.
Gaqkua: Youhoooou. Big winners.
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Akavar fulminait. Qu'on lui défonce la tronche, pas de problèmes. Qu'on lui arrache la jambe, ou qu'on lui pète sous le nez, pas de problèmes. Qu'on plante la tête de Flaadrom dans le plafond, pas de problèmes. Mais blesser Carrona, c'était totalement choquant à ses yeux. Le paladin avait balancé son marteau droit dans la tête de la succube, l'impact envoyant valdinguer la belle à travers une fenêtre.
Akavar: Dis donc toi là, le grand blond! Depuis quand tu te permets de frapper une femme sans défenses?!
Jehan: De un, c'est pas une femme, c'est un démon répugnant. De deux, elle a réussi à m'infliger quelques attaques assez violentes. Elle mérite son sort. Tu devrais plutôt t'occuper de ta souffrance à venir!
Le démoniste pointa un doigt vers le blondinet, les yeux remplis de haine, et l'homme en armure fut recouvert instantanément de flammes vertes. Le paladin recula en hurlant. Il dissipa les flammes avec difficulté, malgré ses protections sacrées et ses auras saintes.
Jehan: Pas mal du tout. Mais ça reste insuffisant face à moi!
Le paladin prit un immense plaisir à abattre son marteau sur le torse du pauvre Akavar. Celui-ci sentit ses os craquer. Le grand blond offrit au démoniste un sourire mesquin éclatant, avec les dents blanches et le sourcil levé de rigueur, en même temps qu'un deuxième coup de marteau. Une voix féminine retentit à l'autre bout de la pièce.
Aydissa: Euh bonjour... J'ai entendu des bruits de combat, et euuuh... Des gens se battaient dehors... Et comme il y a un nécromancien là-dedans... Bref, j'suis rentré.
Jehan: Sortez de là, gente dame, je débarrasse le monde de quelques engeances démoniaques et nécrotiques. Vous aurez tout le temps de m'acclamer quand j'en aurai terminé. Voire plus si affinités...
La draenei exprima tout son mépris et son dégoût par un frisson lui parcourant le corps. Elle hésita à lancer une boule de feu dans le dos du paladin arrogant, mais n'en fit rien, ça n'en valait pas la peine. Alors qu'elle envisageait de quitter la pièce, elle haussa les sourcils en apercevant l'homme en robe noire et bleue, prêt à se faire pulvériser. C'était un réprouvé qu'elle avait déjà vu quelque part...
Elle eut le déclic: Strangleronce.
Aydissa: Hey toi par terre! Akavar?
Akavar: Argh... Fous le camp tiens, laisse moi crever, j'te connais pas.
Aydissa: Mais si, c'est moi, Aydissa! La mage de Strangleronce... Tu t'es pas suicidé au fait?
Jehan: Tu connais cette larve? Drôle d'idée de fréquenter un ver gluant de son espèce.
Aydissa: Tu commences à me gonfler doucement toi, fous lui la paix...
Jehan: Pardon?
Aydissa: J'te conseille de pas lui renfoncer ton marteau dans le bide!
Akavar: Mais va t-en toi, j'peux me débrouiller tout seul!
Aydissa: Bah là non, tu peux pas...
Akavar: Mais barre toi j'te dis!
Aydissa: De toute façon, je vois pas au nom de quoi je devrais t'écouter, je te sauve la vie, et ton orgueil, tu peux t'asseoir dessus.
Jehan: Si tu prends la défense du Mal, je me vois obligé de t'exterminer toi aussi. N'y vois aucune offense.
Une boule de feu de taille non négligeable traversa sans problème les protections magiques du paladin. Celui-ci sentit sa belle chevelure s'enflammer. Akavar plissa les yeux. Non seulement il était sauvé par une femme, une femme de l'Alliance, mais en plus, elle atomisait son adversaire, là où lui-même s'était lamentablement fait éclater la tronche. Jehan sentit pour sa part la situation se corser, et incanta une bulle de protection sacrée, tout en activant sa pierre de téléportation.
Jehan: Depuis quand les jolies filles défendent les monstres? La Lumière vous détruira tous!
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Aydissa: Allez pèpère, tu peux te relever?
Akavar: Bien sûr que je peux, heho. J'suis quand même un gars, un vrai. Gn...
Aydissa: Tout va bien? T'as l'air mal en point...
Akavar: DE QUOI J'ME MELE?
Aydissa: HE, UN TON EN DESSOUS HEIN! T'es vraiment ingrat, j'essaie juste de t'aider!
Akavar: Ouais bah merci, tu veux pas non plus que je t'envoie un bouquet de fleurs?
Aydissa: Je dis pas non.
Akavar: C'était de l'ironie...
Aydissa: Moi aussi c'était de l'ironie...
Akavar: Oh, Mademoiselle fait de l'ironie...
Le démoniste fixa la mage dans les yeux. Des éclairs de colère fusèrent de part et d'autre. Flaadrom venait tout juste de dégager sa tête du plafond, et s'arrêta net de gémir en repérant Akavar et Aydissa, prêts à en venir aux mains, à ce qu'il semblait. Puis, chose insensée dans l'esprit de Flaadrom, Akavar se mit à sourire amicalement à la mage, qui lui rendit son sourire. Le chien corrompu resta bouche bée devant cette scène probablement imaginaire, tant la possibilité qu'Akavar puisse échanger un sourire sincère avec quelqu'un était proche du néant. Flaadrom haussa les sourcils quand Akavar rajouta au sourire un remerciement confus.
Flaadrom: Eh vous nous faîtes quoi là?
Akavar: Tiens, Flaadrom.
Le démoniste venait de retrouver son expression habituelle, à savoir mi-cynique, mi-déprimé. Le chien se sentit soulagé de voir son maître revenir à un état Akavarien standard.
Aydissa: Un autre de tes démons j'imagine. J'ai juste eu la « joie » de rencontrer le diablotin là, Kakao.
Akavar: Gaqkua.
Flaadrom: Bonjour Madame, appelez-moi Flaadrom, pour vous servir. Si vous avez besoin d'un serviteur pénible avec un air obséquieux et des manières de majordome de manoir hanté, je suis à votre disposition.
Akavar: Fais pas attention, celui-là est le plus taré.
Flaadrom: Je crierai bien à la calomnie si ma tête ne tournait pas autant. Foutu plafond.
Aydissa: Vous devriez sortir d'ici.
Akavar: Attends, je dois récupérer un bouquin.
Le démoniste pivota sur lui-même, et fit face à la fin du monde format de poche. Des centaines de livres étaient éparpillés un peu partout, dans un bordel monstre. Flaadrom chercha à foutre le camp pour échapper à la recherche fastidieuse d'un livre à la con, mais Akavar lui bloquait déjà la sortie, les bras écartés.
Akavar: Nan mon vieux, tu vas m'aider!
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L'apothicaire Borlan feuilleta précautionneusement l'ouvrage que venait de lui remettre un Akavar couvert de bandages.
Borlan: Parfait, voici la somme convenue. La Dame Noire sera informée de votre réussite. Tout s'est bien passé j'imagine.
Akavar: C'était galère.
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Au quartier des mages de Fossoyeuse, Charthang, Flaadrom et Carrona, couverts d'hématomes et de blessures diverses, flanaient sur un banc de pierre aménagé.
Gaqkua: Haha, vous verriez vos têtes sérieux, on dirait qu'un char à vapeur vous ait passé dessus une dizaine de fois.
Carrona: Je crois que... Aïe... J'aurai préféré...
Flaadrom: C'était une mission galère.
Charthang: Je sais même pas pourquoi on m'a cassé la figure, plaignez-vous tiens!
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Thierry, allongé dans un fossé, le visage tuméfié et ensanglanté, attendait, espérait, que la mort le prenne. Mais visiblement, c'était pas encore pour aujourd'hui. Drathir sortait tout juste de la taverne de Sombre Comté en courant, la lèvre fendue et trouva rapidement le nain comateux.
Drathir: Ah t'es là! Gg la baston dans la taverne, on en fait pas souvent des comme ça.
Thierry: Ce qui a fait la différence, je pense que c'est le « ta mère la guenon » de Tyrallias.
Drathir: Allez, j'y retourne. Quel gg ce Tyrallias.
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La Hell Patrol, réunie autour d'un feu de camp un peu plus loin dans la région, faisait grise mine. La plupart était couvert de blessures, eux aussi, et fixait leurs assiettes en évitant soigneusement de se croiser le regard. Pas d'argent, pas de récompenses, presque plus rien à bouffer, une dispute violente. Tommy résuma la situation par un faible « journée à la con », en repêchant une de ses dents, échouée dans son potage.
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Phinéas le nécromancien parvint enfin à tirer sa jambe de sous le meuble où elle était coincée, et poussa un soupir de soulagement. Il se vidait de son sang, avait probablement plusieurs côtes cassées et la tronche ravagée. Il rampa hors de sa bibliothèque anéantie, en maudissant par trois fois les aventuriers, et l'alcool.
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Et au milieu de toute cette souffrance, de toute cette douleur, Krayvur empochait 300 pièces d'or pour la tête d'un certain GillyMcFly, père de deux enfants de 6 et 4 ans, et honnête paysan couvert de dettes, ayant eu le malheur de ne plus pouvoir rembourser à cause de deux mauvaises récoltes consécutives. Un odieux réprouvé, le plus odieux de tous, gagnait donc une belle somme, facilement, était fringuant, en bonne forme physique, et vivait comme le type le plus heureux du monde.
Dans cette histoire, il n'y avait décidément pas de justice.
Fin du chapitre 1.
Et pas de questions pour cette fois, j'ai la flemme. En échange, voici une retranscription par vidéo de la bagarre de bar causée par Tyrallias:
http://www.grapheine.com/bombaytv/webdesign-fr-087d4dacd12e33e57dfd1263656948fc.html Allez, au revoir.